OUVERTURE DES MAGASINS LE DIMANCHE EN MOSELLE : 60 ANS D’ACQUIS TORPILLÉS !

, par Udfo57

FO MOSELLE NE L’ACCEPTE PAS.

Un magasin d’alimentation de Metz vient d’obtenir du tribunal administratif de Strasbourg l’annulation de l’arrêté préfectoral du 17 juillet 1956 qui définissait le statut local mosellan sur l’interdiction d’ouvrir les magasins le dimanche et les jours fériés.

Résultat : d’ici trois mois tous les commerces de Moselle pourraient ouvrir tous les dimanches de l’année sur une amplitude de 5 heures maximum.

Cette décision, prise le 4 février, mais rendue publique hier, est totalement scandaleuse, mais pas surprenante, car c’est la Préfecture elle-même qui prépare le terrain depuis plus d’un an.

Comment est-ce possible ?

Les dispositions du droit local relatives au travail le dimanche et les jours fériés (issu de la loi du 26 juillet 1900 sur les professions) ont été intégrées dans le Code du travail en 2008 (des articles L.3134-1 à L.3134-15). On peut en synthétiser les principales de la façon suivante :

1° l’emploi des salariés dans les entreprises industrielles, commerciales ou artisanales est interdit le dimanche et les jours fériés sauf dans les cas spécifiquement prévus dans les articles suivants ;
2° dans les exploitations commerciales (les commerces), les salariés ne peuvent être employés le 1er jour des fêtes de Noël, de Pâques ou de Pentecôte. Les autres dimanches et jours fériés, leur travail ne peut dépasser 5 heures. Pendant les 4 dimanches qui précèdent Noël, l’autorité administrative peut porter le nombre d’heures travaillées à dix ;
3° des statuts, ayant force obligatoire, adoptés par les départements ou les communes peuvent réduire la durée du travail à moins de 5 heures ou interdire complètement le travail le dimanche et jours fériés (après consultation des employeurs et des salariés).

L’application du point 3 en Alsace s’est traduite par des délibérations des Conseils généraux et par de très nombreuses délibérations de communes créant une situation disparate et complexe.

En Moselle, le département a fait un autre choix. Le Préfet a pris deux arrêtés le 17 juillet 1956 (un pour Metz et l’autre pour le reste de la Moselle, mais identique dans les termes) qui ont fixé les règles de manière uniforme pour tout le département.

Le statut mosellan est très simple : "L’ouverture des commerces le dimanche et jours fériés reste interdite, sauf pour les commerces suivants : pharmacies, débit de tabac, journaux, hôtels, restaurants, cafés, spectacles, transports, pâtisseries et fleurs naturelles".

Clair, net et précis... trop pour beaucoup !

C’est ce statut local qui vient d’être considéré comme illégal par le tribunal administratif de Strasbourg au motif qu’il a été mis en place sur décision du Préfet et non pas sur délibération du Conseil général.

Certains considèrent qu’un flou juridique entoure les arrêtés du Préfet de 1956, mais ce n’est pas nouveau et cela n’a pas empêché le statut mosellan de s’appliquer depuis 60 ans ; l’Institut du droit local par exemple l’évoquait régulièrement par exécration de la Moselle, et, car ces décisions préfectorales étaient considérées comme trop rigides, trop protectrices, pour celles et ceux qui veulent des règles à géométrie variable, adaptables aux exigences versatiles et mercantiles du patronat.

L’Union départementale FO conteste cette illégalité dans la mesure où avant les lois de décentralisation de 1982, au moment où le statut local de Moselle était adopté, le Préfet présidait ou exerçait une tutelle sur le Conseil général. Le statut local validé par le Préfet n’était donc pas illégitime : il avait par ailleurs l’avantage d’unifier de manière efficace l’application du droit local sur tout le département.

L’Union départementale condamne cette décision de justice dont elle considère qu’elle n’est ni juste, ni impartiale. FO Moselle condamne aussi la Préfecture de Moselle qui a assuré une défense volontairement à minima, qui a décidé de capituler et de ne pas faire appel de cette décision. Mais ce n’est pas une surprise.

En effet, cette décision conforte le Préfet dans sa volonté d’adapter les dispositions du droit local aux appétits sans limites du patronat et des commerçants :

C’est lui et le président du Conseil général de Moselle qui début octobre 2013 commandaient un rapport du Conseil économique, social et environnemental de Lorraine sur l’ouverture dominicale des commerces en Moselle ; rapport qui concluait à la nécessité d’une adaptation des dispositions locales (FO s’y est opposé).

C’est lui encore qui a généralisé en juillet 2014 l’ouverture des commerces d’alimentation de moins de 120 m2 et l’organisation de marchés tous les dimanches sans exception. C’est lui aussi qui a mis fin, en novembre 2014, à l’usage qui limitait à 3 dimanches depuis 20 ans les ouvertures avant Noël.

C’est lui qui crée enfin, les conditions d’une nouvelle libéralisation en la matière. Le Tribunal fixe un délai de 3 mois pour abroger les arrêtés de 1956 et donc pour trouver d’autres solutions. Dans un communiqué publié le 23 février, le Préfet de Moselle déclare : "Cette période permettra de lancer les réflexions nécessaires à l’adoption d’un nouveau statut par le Conseil général de la Moselle, conformément aux dispositions du Code du travail, dans un esprit de concertation et en s’inspirant des évolutions nationales en cours".

Le patronat mosellan jubile déjà. Conformément à la politique libérale du gouvernement, le Préfet ne propose ni plus ni moins que d’adapter le droit local au projet de loi MACRON.

Pour l’Union départementale FO Moselle, qui condamne le projet MACRON, c’est inacceptable. S’il doit y avoir un nouveau statut local adopté par le Conseil général, il doit reprendre mot pour mot les principes définis par les arrêtés de 1956.

À quelques semaines des élections cantonales, le Président du Conseil général doit prendre ses responsabilités et garantir les droits des salariés mosellans.